le financement des uniformes

Le financement de l’habillement des troupes a principalement évolué au fil des âges suivant le mode de recrutement des armées. On peut à ce sujet distinguer plusieurs époques. La première remonte aux anciennes formations, période pendant laquelle les rois n’avaient aucune dépense à faire pour l’habillement des hommes appelés à marcher à l’armée. La suivante renferme le long intervalle pendant lequel les soldats s’entretenaient au moyen de leur solde. Par la suite, on substitua à ce mode de financement divers systèmes d’administration avec l’établissement des masses.

Avant la création d’une armée de métier dépendant de la couronne, l’habillement des hommes destinés à servir sous les armes n’était pas à la charge de l’état, mais à celle des seigneurs auxquels les souverains avaient concédé des fiefs. Outre l’hommage et le serment de fidélité, les bénéficiaires de ces libéralités s’engageaient d’accomplir certains droits et devoirs auxquels on les astreignit et dont le principal fut de continuer à servir le Roi dans ses armées. Ainsi, suivant les bénéfices produits par ces fiefs, le roi exigeait de ces seigneurs féodaux un certain nombre d’hommes habillés et équipés. Avec la publication du ban et de l’arrière-ban qui déterminaient les lieux de réunion, le roi n’avait aucune dépense à faire pour l’entretien de ces soldats.

La création des compagnies d’ordonnance par Charles VII en 1449 qui sont à l’origine d’une armée de métier, c’est-à-dire une armée maintenue et entretenue en temps de paix comme en temps de guerre, ne changea rien au financement de l’habillement qui demeurait à la solde de chaque officier et soldat.

Cette étude à pour objet de résumer les différentes méthodes de financement qui ont été utiliser pour acheter, entretenir les uniformes et le matériel entrant dans l'équipement et le harnachement  des soldats et cavaliers depuis Louis XVI jusqu'au début du premier empire.

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Louis XIV (1643 – 1715)    (audio : 1'50)

François Le Tellier, marquis de Louvois, fut chargé par Louis XIV de la direction du département de la guerre en 1662. Il obtint par survivance cette charge de son père Michel Le Tellier dès l'âge de 14 ans (1655). Ce dernier, secrétaire d'État à la Guerre (1), patient et laborieux autant que modeste et discret François Le Tellier, marquis de Louvoisavait acquis sous l'autorité du cardinal Mazarin une grande connaissance des armées. Il connaissait sa force, mais aussi les maux qui la rongeaient. Ce grand serviteur de l'État eut l'intelligence d'instruire et de former à cette fonction ses fils, dont François (dit Louvois). D'une probité et d'une loyauté exemplaire, Louvois allait consacrer son énergie à extirper tous les abus qui se pratiquaient dans les armées en organisant un contrôle sévère à l'égard des officiers. Il brisa la résistance de ceux qui ne se croyaient pas tenus à l'obéissance. Il les obligea à résider auprès de leurs troupes, de choisir, comme il le disait, entre la profession de courtisan et celle d'officier. Il préféra les riches officiers à ceux qui n'avaient que leur titre, car à cette époque où le budget de la guerre était presque nul, il fallait qu'un capitaine ou un colonel puisse subvenir aux besoins de sa troupe. C'est précisément toutes ces qualités qui lui valurent tant d'ennemis.

Sous le règne de Louis XIV, l'armée n'était ni permanente ni régulière (2) et les corps appartenaient toujours à leur chef : au capitaine, la compagnie et au colonel, le régiment (3). Lorsque Louvois prit ses fonctions de secrétaire d'État à la Guerre, l'armée était dans un état qui laissait fort à désirer. À l'exception de quelques corps, l'indiscipline régnait en maître, la hiérarchie des grades était confuse ou méconnue, les rivalités aristocratiques y produisaient de grands désordres. L'autorité du roi restait marginale, ses ordonnances ne servaient qu'à fixer l'effectif de ces unités, leur armement et la paie. Les directives du secrétaire d'État étaient le plus souvent ignorées.

L'oeuvre de ce grand ministre fut de mettre l'armée dans les mains du roi.

 Dès son entrée en fonction, Louvois, par une série d'ordonnances et de règlements, s'appliqua à détruire les prétentions des arrogants, à briser les récalcitrants et à lutter contre la corruption qui avait finie par s'imposer comme un  moyen ordinaire d'enrichissement.

L'un des maux à l'origine de cette déliquescence, fut le maintien de la vénalité des charges. Lorsque les capitaines et les colonels avaient obtenu leur commission, ils devaient, dans un premier temps, recruter eux-mêmes les hommes qui allaient former la compagnie et le régiment. Ils étaient chargés ensuite de les équiper, les armer, les habiller, ils devaient également acheter et entretenir les chevaux. Le roi ne fournissant que la solde, ces commissions devenaient, entre les mains de ceux qui en étaient nantis, de véritables titres de propriété.

  Afin de rentrer dans leurs fonds et de tirer profit de cet achat, ces officiers, qui avaient payé cher leur brevet (de 8000 à 12 000 livres pour un capitaine, de 15 000 à 22 000 livres pour un colonel ), allaient se livrer à toute sorte de profits illicites. Cette concussion s'effectuait aussi bien à l'encontre de la couronne que de la troupe.

Au premier rang des moyens coupables qu'employaient les officiers pour grossir leur bourse aux dépens de l'État, il y avait l'industrie des passe-volants. La manoeuvre consistait à n'entretenir volontairement qu'un nombre d'hommes inférieur à l'effectif fixé par ordonnance. Les soldats ou cavaliers manquants étaient remplacés, les jours de montre (de revue), par des valets ou des vagabonds recrutés pour la circonstance ou bien encore par des soldats obligeamment prêtés pour un jour par un capitaine ami. Ces faux soldats ou passe-volants comblaient les lacunes pour le temps de la revue et s'évanouissaient le soir même. Ainsi, grâce à cette astuce, les capitaines recevaient, d'une part, de substantielles gratifications pour avoir une compagnie au complet et empochaient, d'autre part, la solde des soldats manquants. Cette disproportion entre l'effectif supposé d'après les contrôles et l'effectif réel pouvait avoir des conséquences fâcheuses lorsqu'il fallait, les jours de bataille, aligner un certain nombre d'hommes pour faire face à l'ennemi, mais celaGrenadier vers 1670 devenait une aubaine pour les capitaines sans scrupule. Ainsi, le lendemain de la bataille, les fameux absents devenaient des morts imaginaires et avec ces victimes de guerre fantôme, l'officier pouvait revendiquer la belle conduite de ses troupes et recevoir d'importantes gratifications pour réparer les pertes.

Les mestres de camp (4) ou colonels dans leurs régiments, les capitaines dans leurs compagnies trafiquaient les charges de lieutenants et de bas officiers qu'ils vendaient à leur gré. Il n'était pas rare de retrouver ces officiers malfaisants à Paris, sans y être autorisé, dissiper au jeu et en folles débauches l'argent destiné au soldat. Pour justifier cet abus de confiance, ces malfaisants trouvaient ensuite mille raisons pour ne payer aux hommes qu'une partie de la solde ou pour ne pas la payer du tout. C'est ce que révèle une ordonnance du 7 février 1661 (pdf) dans laquelle « Le roi, apprenant que certains capitaines d'infanterie, sous prétexte que les fonds ne sont pas toujours arrivés à temps pour le paiement, avancent 3 sols aux soldats de leur compagnie sur les 5 alloués et ne leur tiennent aucun compte du reste quand le paiement de la solde leur est fait ». Le préjudice était grand. Les soldats floués, mal vêtus, mal équipés, mal armés et surtout mal nourris n'avaient de ressource pour vivre que le pillage, le vol ou la désertion. Louis XIV ordonna aux capitaines « de payer exactement à chaque soldat les 5 sols par jour sans leur retrancher ni retenir autre chose que les avances qu'ils leur ont faites ». Les commissaires des guerres étaient chargés de cette surveillance, mais elle était très superficielle quand elle n'était pas tout simplement illusoire. La connivence était le plus souvent la règle, car les violences des officiers prévaricateurs à l'encontre des commissaires n'étaient pas rares.


Avant Louvois, la solde n'était ni fixe ni régulièrement payée. Elle variait quelquefois d'une armée à une autre, d'un régiment à un autre, même d'une compagnie à une autre. Les arriérés étaient souvent considérables, de là, mille plaintes et mille désordres de la part des officiers et des soldats. Avec l'ordonnance du 20 décembre 1663, Louvois rendit la solde invariable et les paiements réguliers. La solde était alors calculée à la journée. Elle fut fixée aux taux suivants :

Une fois la compagnie formée et la revue passée, le capitaine recevait tous les mois la solde de ses soldats. Elle leur était versée tous les dix jours sous forme de prêt. Avec cette somme, correspondant à un tiers de leur solde, chaque homme devait s'entretenir et se nourrir. Les enrôlements étant faits pour une courte durée, pour une ou deux campagnes, il n'y avait pas lieu de se préoccuper de l'habillement proprement dit du soldat ( justaucorps, chausses et chapeaux ), parce que l'homme, une fois enrôlé, continuait à porter son habillement personnel, la tenue uniforme n'étant pas encore établie. Cependant, les chemises, les bas et les souliers s'usaient pendant que l'homme était au service, et il devait les remplacer. En temps de guerre, le soldat pouvait pourvoir facilement à cet entretien, grâce au butin et à la maraude, mais en temps de paix, ces ressources extraordinaires lui faisaient défaut. Il en était réduit à prélever sur sa solde journalière l'argent nécessaire pour remplacer ses effets usés. Le prêt pour un fantassin était de 50 sols, or une paire de souliers, par exemple, coûtait alors 3 livres (60 sols). Le soldat ne pouvait, avec cette somme, vivre pendant ce temps et acheter les souliers qui lui étaient nécessaires. Il n'avait alors d'autre moyen que celui d'obtenir de son capitaine une avance dont le montant lui était ensuite retenu sur sa solde à raison d'un sol par jour ou plus selon les conventions faites. Bientôt, tous les soldats des compagnies se trouvèrent en compte avec leur capitaine. Telle fut l'origine de la masse individuelle.

Les premiers effets uniformes furent prescrits par les colonels de quelques formations après la paix signée entre les couronnes de France et d'Espagne en novembre 1659. Cet usage s'établit graduellement par la seule volonté des colonels et des capitaines qui voulaient donner à leur unité le panache qui correspondait à leur rang. Rien n'était déterminé et les couleurs, la coupe du vêtement, les galons dépendaient uniquement des goûts de chaque chef. Par esprit d'imitation, les autres suivirent peu à peu. Ce que Louvois n'aurait pu obtenir par ordonnance, la vanité et l'amour-propre des officiers l'imposèrent.


(1) À l'origine, les secrétaires d'État n'étaient que de simples clercs ou notaires, attachés à la personne du roi pour écrire ses ordres sous sa dictée. L'importance de leur charge s'accrut peu à peu et ils portèrent différents noms. Henri II fixa leur nombre à quatre et leur donna le titre de secrétaire d'État. Ils étaient chargés de veiller à l'exécution des mesures adoptées dans le conseil royal, auquel ils assistaient sans avoir le droit de prendre part aux délibérations. Louis XIV porta haut leurs fonctions. Les ministres qui les exerçaient gouvernaient véritablement la France, sous la haute direction du roi. Les quatre secrétariats étaient ceux de la maison du roi, des affaires étrangères, de la marine et de la guerre.

(2) Lorsque la paix revenait, les troupes étaient licenciées. Quelques régiments d'infanterie avaient obtenus, sous Louis XIII, le privilège d'être maintenus, mais bien souvent avec un effectif réduit. Ces régiments, d'ancienne création, prirent le nom de vieux (6 régiments) et de petits vieux (6 régiments).

(3) Quand la guerre rendait nécessaire la formation ou l'augmentation des armées, le roi délivrait à ses gentilshommes des brevets ou commissions pour lever des régiments ou des compagnies. Celui qui recevait le brevet de capitaine, recrutait lui-même les hommes de sa compagnie dont il devenait réellement le propriétaire. Le colonel avait toute latitude pour organiser son régiment qui en devenait sa propriété.Le colonel pouvait alors vendre son régiment et la capitaine sa compagnie.

(4) Par ordonnance du 28 juillet 1661, l'appellation de mestre de camp est remplacée par celle de colonel.

(5) 1 livre = 20 sols (ou sous) et 1 sol = 12 deniers


Secrétaire d'État de la guerre : Michel Le Tellier de Louvois

Ordonnance du 5 décembre 1666

Après avoir rendu la solde régulière, Louvois voulu supprimer les abus liés à la retenue sur solde que pratiquaient tous les capitaines. Avec un prêt versé tous les dix jours, ce procédé s'était naturellement imposée, mais il faisait l'objet d'innombrables polémiques dans la mesure où sa comptabilité dépendait de la seule appréciation des capitaines. Louis XIV, dans deux ordonnances datées du 20 avril et 27 juillet 1666, réitéra auprès de ces officiers sa volonté d'interdire cette pratique. Cependant, quelques mois plus tard, il fallut se rendre à l'évidence. La grande majorité des soldats, incapable de gérer leur prêt, n'était plus en mesure d'assurer le renouvellement de leurs effets. L'état vestimentaire des compagnies se dégrada rapidement. Louis XIV, voulant concomitamment supprimer la misère vestimentaire qui s'était installée dans les corps et annihiler tous les abus que ces retenues avaient fait naître, légalisa le procédé. Dans une ordonnance du 5 décembre 1666 (pdf), il autorisa les capitaines et officiers à retenir 30 sols par mois sur la solde des cavaliers et soldats. Cette retenue ne devait être employée qu'à l'habillement, aux chaussures et objets de remonte des cavaliers. Un décompte trimestriel devait être dressé en présence des commissaires et adressé au roi.

Carabinier 1690

 Pour obliger les capitaines à faire les décomptes à leurs cavaliers et soldats, le roi, dans une ordonnance du 7 janvier 1669 (pdf), ordonna que les comptes fussent purgés en présence du commissaire des guerres, chargé de la police du corps, afin que les sommes restants dues, fussent restituées soi au capitaine, soit au soldat.

Les écritures de la compagnie étaient alors tenues par un fourrier, qui était un caporal, anspessade ou soldat désigné par le capitaine et n'était pas dispensé de remplir les fonctions de son grade malgré son emploi de comptable. À la suite de cette ordonnance, le fourrier dut ouvrir pour chaque homme un compte présentant les recettes provenant de la retenue et les dépenses faites pour son habillement. La masse individuelle venait ainsi d'être organisée légalement.

Ordonnance du 20 novembre 1671

Dans la pratique, les abus n'avaient pas disparu. Les capitaines, sous prétexte de vieilles dettes, prélevaient sur la solde des soldats des sommes plus importantes que celles qu'ils étaient autorisé à faire. Pour mettre un terme à ces arbitraires, Louis XIV, dans une ordonnance du 20 novembre 1671 (pdf), prit plusieurs dispositions. L'idée d'un habit uniforme ayant fait son chemin peu à peu dans les armées, il décida tout d'abord de l'imposer dans la cavalerie de sorte « que les compagnies soient toujours composées de cavaliers et de dragons vêtus de même façon ». Si cette mesure permettait de s'identifier sur le champ de bataille et contribuait à lutter efficacement contre les déserteurs qui étaient immédiatement identifiés, elle uniformisait le prix des effets pour tous les cavaliers. Ainsi, le prix des vêtement et objet à remplacer étant parfaitement connu, on pouvait déterminer précisément le montant à prélever mensuellement sur la solde de chaque cavalier. Cette obligation étant faite, il prescrivit aux commissaires des guerres de veiller à l'objectivité des échanges à réaliser en dressant, avec chaque capitaine et soldat, un inventaire des objets et vêtements à renouveler pour le mois de septembre de chaque année. Le mois de mars suivant, le compte était balancé : s'il y avait excédent de recettes ou avoir à la masse, cette somme était remise au soldat; s'il y avait, au contraire, excédent de dépenses ou débet à la masse, le soldat se trouvait redevable envers son capitaine et, d'après les usages, ne pouvait prendre son congé tant qu'il n'avait pas acquitté sa dette. Pour obliger les capitaines à respecter les directives de cette ordonnance, Louvois s'attaqua à leur toute puissance en instaurant des sanctions à leur égard. Ainsi, ceux qui passaient outre ces prescriptions s'exposaient à être privés de leur charge pendant un mois et à verser au soldat lésé ses appointements.

Même s'il n'était pas encore parfaitement défini, l'habit uniforme devenait officiellement la tenue portée dans les armées.

Le sol retenu par jour à chaque homme ne produisant que 18 livres par an, cette somme fut bientôt reconnue insuffisante pour pourvoir à l'entretien et au renouvellement des effets. Afin de disposer de la ressource financière indispensable à cette opération, on décida d'assigner à chaque effet une durée de vie. Après divers tâtonnements, on fixa la durée de vie à deux ans pour le justaucorps, un an pour le chapeau et la culotte et six mois pour les autres effets. Cependant, la retenue du sol journalier qui représentait 36 livres en deux ans était toujours insuffisante. Le roi décida, en 1672 ou 1673, que l'extraordinaire des guerres paierait à chaque régiment 18 livres par an et par homme pour l'habillement. Ces 18 livres formèrent la masse d'habillement du corps, tandis que la retenue du sol par jour resta la masse du soldat et fut destinée au renouvellement des objets de linge, de chaussure et aux réparations. 

Ordonnance du 15 novembre 1679

Cette disposition subsista jusqu’en 1679, époque à laquelle Louvois dû mettre un terme au détournement de fonds que les capitaines avaient mis en place grâce aux mesures précédentes. En effet, avec l'apport financier que l'extraordinaire des guerres versait pour l'habillement, ces officiers crurent bon de disposer pour leur profit particulier du sol qu'ils étaient autorisés à retenir sur la solde de leurs soldats. Parut alors l'ordonnance du 15 novembre 1679 (pdf). Désormais, sur ce sol, huit deniers seraient mis entre les mains du trésorier général pour être employés à l’achat des étoffes entrant dans la confection des uniformes. Le reliquat des sommes ainsi perçues restait à la disposition des capitaines qui devaient le consacrer à l’achat de bas, souliers et linge pour les soldats de sa compagnie.


En 1685, le négoce des tissus ayant fait apparaître que le coût du drap gris-blanc était le moins élevé, il fut retenu pour habiller l'infanterie française. L'habit devenait de plus en plus uniforme, mais ses détails variés encore dans chaque régiment lors des renouvellements des effets. L'achat des effets d'habillement se faisait désormais par bataillon et non plus par compagnie. Les capitaines déléguaient l'un d'entre eux pour acheter les étoffes et faire confectionner les effets d'après le modèle arrêté pour le corps. Il s'était établi à Paris, à Lyon et dans d'autres villes importantes, de grands industriels qui se chargeaient de cette confection et de fournir les chapeaux, le linge et les objets d'équipement. La chaussure était faite sur place au moyen de marchés passés avec les cordonniers de la garnison. Tous les marchés, qui stipulaient les époques du paiement, devaient être approuvé par l'inspecteur du corps. Ce dernier était également chargé, lors de la réception des marchandises, de les examiner. Il devait renvoyer celles qui ne corresponaient pas au cahier des charges et, si il n'y avait aucun refus, il donnait au commis du trésorier, qui avait entre ses mains l'argent des masses, l'autorisation de faire les paiements convenus dans les marchés.

Les draps communs employés pour les vêtements des soldats étaient fabriqués à Lodève et aux environs. Cependant la plupart des régiments étaient en garnison dans les places du Nord et de l'Est et ces draps leur parvenaient grevés de frais de transport considérables, ce qui augmentait ainsi le prix de l'habillement. De nombreux capitaines, cherchant toujours à diminuer leurs dépenses, achetaient des draps d'Angleterre, des Pays-Bas ou de Hollande qui, malgré les droits de douane, leur revenaient moins cher que ceux de Lodève. Le transport par eau étant bien moins coûteux. Cependant, ces achats causaient un grave préjudice à l'industrie nationale. Pour la protéger, une ordonnance du 20 octobre 1686 défendit aux capitaines d'employer des produits étrangers pour l'habillement de leur compagnie. Hélas cette mesure ne fut pas favorable aux soldats, car beaucoup de régiments, pour ne pas obérer leur masse, ne renouvelèrent plus leur habillement tous les deux ans, mais tous les trois ou quatre ans.

Jusqu'alors, aucune prescription officielle n'avait réglé les détails de l'habillement, les quantités d'étoffe à employer et le prix des effets. Alors parut le règlement du 26 mai 1704 qui fixa tous les détails de l'habillement du soldat d'infanterie. Il était composé, d'un justaucorps, d'une veste, d'une culotte, chemise, cravate, bas, chapeau, souliers et ceinturon. Le coût total de cet habillement s'élevait à 51 livres, 5 sols et 7 deniers.

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Louis XV (1715 - 1774)    (audio : 20'10)

À la mort de Louis XIV, le 1er septembre 1715, le duc d'Orléans, régent du royaume, remplaça le ministre de la guerre par un conseil de guerre composé de onze membres, dont le  maréchal duc de Villars, qui en était le président, et l'intendant Claude Leblanc. C'est avec ces deux conseillers que le régent traita la plupart des affaires. Claude Le Blanc fut nommé ministre de la guerre en 1718.


Secrétaire d'État de la guerre : Claude Le Blanc

Réglement du 6 avril 1718

Annexé à l'ordonnance du 6 avril 1718 portant sur la réduction des bataillons d'infanterie et leur organisation hiérarchique, un réglement fixait le nouveau traitement que la couronne accordait à ses troupes d'infanterie. En sus de l'augmentation de solde, un fonds appelé masse fut attribué à chaque compagnie et remis entre les mains des trésoriers pour être employé à l'habillement. Une partie de ces fonds était destiné à dédommager les capitaines des frais qu'ils avaient engagés pour l'habillement de leurs recrues. Ce fond, payé sur le pied complet de la compagnie était formé à raison de deux sous par sergent et par jour et un sous pour le caporal, l'anspessade et le fusilier.

Avec l'augmentation de la paie, on crut bon de supprimer la retenue sur solde et de laisser aux sergents et soldats le soin de s'entretenir eux-mêmes de linge et de chaussures. L'article IX de cette ordonnance avait malgré tout prévu le cas ou le soldat serait négligeant. Le capitaine de la compagnie dont dépendait le soldat rendait compte au chef de corps qui seul pouvait ordonner une retenue sur la solde jusqu'à ce que tout manquement à l'entretien du linge et des chaussures soit rétabli.

Le même jour, une nouvelle grille de solde fut dressée pour les cavaliers. Le montant de la masse fut calculée à raison de un sol par jour et par cavalier et dragons. Chaque capitaine recevait également mille cinquante livre par an pour la remonte de sa compagnie.

Ordonnance du 24 août 1720

Les variations de la valeur nominale des espèces ayant entraîné une sévère augmentation du prix des étoffes, la retenue en usage devint insuffisante de sorte que les capitaines ne furent plus en mesure de pourvoir entièrement à l'habillement de leur compagnie. Avec l' ordonnance du 24 août 1720 (pdf), le secrétaire d'État de la guerre, Claude Le Blanc, vint à leur secours. Pour compenser l'inflation monétaire, le gouvernement s'engagea à combler les déficits qui s'étaient creusés entre la faiblesse de la masse d'habillement et la cherté des étoffes. Afin d'obtenir le meilleur prix, il décida de traiter directement avec la compagnie des Indes pour la fourniture de toutes les étoffes tant pour les soldats, cavaliers et dragons, que pour les habits uniformes des officiers. En prévision de ce marché, on demanda aux régiments de dresser un état du nombre d'hommes à habiller et d'indiquer la couleur et la quantité des différentes étoffes nécessaires à la confection des uniformes.

Ce système fit apparaître deux inconvénients. Si l'état ne comblait pas le déficit, les capitaines prolongeraient la durée des vêtements pour ne pas être exposés à combler cette différence. Si, au contraire, l'état était disposé à le combler, les capitaines profiteraient de cette aubaine pour élever au plus haut l'éclat de leur compagnie qui, à cette époque, était toujours leur propriété.

En 1722, avec l'augmentation des effectifs, le fond destiné à la masse d'habillement fut fixé de la manière suivante : 20 deniers pour les sergents au lieu de deux sous et 10 deniers pour la troupe au lieuArcher de la maréchaussée - 1727 de 1 sous (1 sous = 12 deniers).

Maréchaussée : Ordonnance du 29 novembre 1728

À la même époque, Louis XV, par son édit de mars 1720, supprimait la multitude des petites compagnies de maréchaussée créées depuis François Ier et commandées par des officiers établis sous différents titres. Il les réunissait en un seul corps composé de 30 compagnies correspondant aux 30 généralités du royaume. En établissant ces 30 compagnies sur un même modèle, commandées par des officiers de même titre et de même rang dans chacune d'entre-elles, le roi entendait désormais soumettre la maréchaussée à la discipline militaire.

Pour accompagner cette militarisation, Louis XV, dans son ordonnance du 16 mars 1720 (pdf), portant sur la subordination et la discipline de ces compagnies, imposait désormais à la maréchaussée un uniforme semblable dans son aspect général à celui en usage dans les armées. Elle abandonnait enfin le hoqueton, la bourguignotte, les brassards, les tasselots et autres éléments de cuirasse qui lui avaient été imposés par Henri III dans une ordonnance de 1584.

Pour financer cet uniforme, Louis XV dans une ordonnance du 29 novembre 1728 (pdf), établissait dans chaque compagnie de la maréchaussée une masse d'habillement à l’instar des autres armes. À compter du premier janvier 1729, une retenue trimestrielle était effectuée sur la solde des exempts, brigadiers, sous-brigadiers et archers. Les retenues annuelles étaient les suivantes :


Solde annuelle Retenue annuelle
Exempt 700 livres 80 livres
Brigadier 600L 60L
Sous-brigadier 550L 48L
Archer 500L 40L

Le premier habit uniforme qui fut attribué à la maréchaussée était composé d'un justaucorps bleu de roi avec parements et doublure écarlates avec bouton argent et une aiguillette de soie blanche. Un chapeau bordé argent, une bandoulière et un ceinturon de buffle bordés d'un galon d'argent, un manteau bleu avec parement écarlate, bottines à boucles de cuivre.

Les sous-brigadiers se distinguaient par trois ganses d'argent à queue sur le parement de l'habit (ou retroussis de l'extrémité de la manche), le brigadier par six ganses, trois sur le parement et trois sur la manche. L'habit de l'exempt avait trois ganses sur la manche, trois autres sur la poitrine et trois sur chaque poche. Les lieutenants avaient six ganses sur la poitrine dont une en haut, deux au milieu et trois au-dessus des poches, trois sur chaque manche, trois sur chaque poche, une sur le côté et trois derrière l'habit. Le prévôt avait des ganses sur la poitrine disposées de deux en deux jusqu'à la hauteur des poches, quatre sur chaque manche, quatre sur chaque poche et quatre sur chaque pan arrière



Secrétaire d'État de la guerre : Nicolas d’Angervilliers

Ordonnance du 10 mars 1729

Claude Le Blanc mourut en 1728. Louis XV nomma au poste de secrétaire d'État à la Guerre : Nicolas d’Angervilliers qui s'aperçut bien vite que les capitaines des compagnies d'infanterie et de cavalerie avaient amplement abuser de la générosité de l'État. Il s'applica à y mettre un terme. Afin de ne plus combler les déficits que ces officiers créaient pour l'habillement de leurs compagnies, il décida de mettre en corrélation le produit des fonds destinés à l’habillement avec les dépenses. Pour y parvenir, l'ordonnance du 10 mars 1729 (pdf) détermina que la durée de la veste et de l’habit serait portée à trois ans. Les éléments à la charge des fonds de la masse furent précisés. On pensait par cette mesure d’équilibre, juguler toutes dérives. Hélas, c’était sans compter, sur les frais annexes imputés à cette masse et qui couvraient les frais de déplacement des officiers chargés de négocier les marchés, les frais d’emballage et d’expédition des marchandises. Ces dépenses soumises à l’arbitraire eurent bien vite raison de cette ordonnance qui n’atteignit pas le but qu’on s’était proposé.

Ordonnance du 28 mai 1733

Quatre ans après, on crut obvier à tous ces défauts par une nouvelle ordonnance datée du 28 mai 1733 (pdf). Elle interdisait aux seuls régiments de cavalerie de se livrer aux achats d’habillement, sans avoir préalablement mis en concurrence les fabricants locaux sur la qualité, la quantité et le prix de chaque objet. Ces marchés ne pouvaient recevoir leur exécution qu’après avoir été approuvés par le secrétaire d’État. On ne sait par quelle considération, il fallut attendre l'ordonnance du 20 avril 1736 (pdf) pour que cette mesure de bon sens soit élargie à l'infanterie.



Secrétaire d'État de la guerre : Le comte d'Argenson

Ordonnance du 19 janvier 1747

Malgré ces mesures, la gestion de l’habillement confiée aux régiments se révéla désastreuse. Les corps, dans un état de dénuement affligeant, croulaient sous les dettes. Parue alors l'ordonnance du 19 janvier 1747 (pdf) qui tenta de porter remède à cette gestion calamiteuse. Comme son prédécesseur, le secrétaire d'État de la guerre, le comte d'Argenson, se fixa de proportionner la dépense de cette masse à ses ressources naturelles. Pour cela, on détermina avec exactitude, pour chaque partie de l’habillement, les quantités de matière et les qualités qu’elles devaient posséder. Ces précisions auraient certainement produit un résultat avantageux avec un appel d’offres au niveau du royaume, mais il fut décidé de laisser aux régiments cette possibilité. Sans concurrence sérieuse et gérée par une administration régimentaire insouciante, les dettes continuèrent à s’accumuler et le gouvernement éprouvait toujours plus d’embarras à les acquitter. Le retard dans les paiements fut à l’origine de nouveaux abus de la part des fournisseurs. Profitant du caractère de dénuement dans lequel se trouvaient les régiments, les fabricants vendaient plus cher leur marchandise dont ils altéraient bien souvent la qualité. À cela il fallait rajouter l’augmentation des étoffes occasionnée par la concurrence que se livraient les régiments entre eux. Ce désastreux système venait se joindre à la difficulté de faire des approvisionnements. Ainsi, il n’était pas rare que les hommes nouvellement incorporés fussent exposés à rester longtemps sans uniforme.

Pour restreindre la dépense, on diminua les effectifs des corps, on fractionna annuellement leBrigadier maréchaussée - 1740 remplacement des effets. Ainsi, une ordonnance du 1er mai 1750 imposait que l'habillement des seize régiments de dragons ne serait plus fait en totalité, mais seulement par tiers, par quart ou suivant la partie qui serait jugé indispensable. On fixa la quantité d'étoffe nécessaire pour confectionner chaque partie de l'habit et l'on imposa un uniforme plus standard dans ce corps qui s'était forgé de nombreuses particularité.

Ordonnance du 1er février 1751

Dans ce règlement relatif au paiement des troupes, il fut décidé que le montant de la masse toujours fixée à vingt deniers pour les sergents et dix pour la troupe, serait désormais scindée en grosse masse et petite masse. La grosse masse, établie sur le pied de douze deniers par sergent et de six deniers par brigadiers, cavaliers, hussards, dragons et soldats, était destinée à l'achat des étoffes pour le renouvellement des habits. La petite masse, constituée des huit deniers restant par sergent et des quatre deniers pour les autres était utilisée pour l'entretient et les réparations de l'habillement et de l'équipement. Les sergents et les hommes de troupe continuaient à s'entretenir en linge et chaussures au moyen de leur solde.

Maréchaussée : Ordonnance du 10 octobre 1756

Les compagnies de maréchaussée étaient confrontées à un autre problème. La masse d'habillement s'étant révélée insuffisante pour celles ayant un faible effectif, il fut jugé utile de toutes les regrouper en un seul fonds géré par les trésoriers généraux des maréchaussées. Ce fut l'objet de l'ordonnance du 10 octobre 1756 (pdf). Le marché fut alors passé auprès d'un fournisseur général unique pour une durée de six années. Il était chargé de la confection des habits, surtouts et manteaux suivant les qualités et poids définis au marché et de leur livraison au chef-lieu de chaque généralité. Chaque prévôt général lui adressait les mensurations des exempts, brigadiers, sous-brigadiers et cavaliers concernés par le renouvellement d'effets.

Il fut décidé à cette occasion de fixer à six ans le renouvellement de l'habit et à douze ans celui du manteau. L'aiguillette fut supprimée et la bandoulière ne fut plus obligatoire. Elle ne fut d'ailleurs plus fournie. Les bottines à boucle de cuivre furent supprimées et remplacées par une paire de bottes molles. Après trois ans d'usage, les personnels concernés pouvaient prétendre à la fourniture d'un chapeau, de tissus et de boutons pour servir à la réparation de l'habit.

Ordonnance du 25 février 1758

Pour résorber les dettes accumulées par les régiments, l'État se trouva dans l'obligation d'augmenter le volume financier de la masse d'habillement. Avec l'ordonnance du 25 février 1758 on augmenta la valeur de l'allocation de 20 à 24 deniers pour les sergents et de 10 à 12 deniers pour les soldats, cavaliers et dragons. La grosse masse, fut établie sur le pied de seize deniers par sergent et de huit deniers par soldat. Elle était destinée à la fourniture du justaucorps, de la veste, des culottes, du chapeau, du manteau, des housses et chaperons pour la cavalerie ainsi qu’à toute la partie de l’équipement. La petite masse, constituée des huit deniers restant par sergent et des quatre deniers pour les autres était utilisée pour l'entretient et les réparations de l'habillement et de l'équipement. Le 1er juin suivant, une ordonnance augmentait les appointements et soldes des troupes. Les sergents reçurent un supplément de solde de quatre deniers par jour, les caporaux, anspessades, grenadiers, fusiliers et tambours, deux deniers. Avec cette nouvelle solde qui leur était versée sans aucune retenue, ils devaient continuer à s'entretenir en linge et chaussures.

Comme il fallait s’y attendre, le désordre qui s'était installé dans ce commerce était tel que ces augmentations n’eurent aucun effet sur le but que l’on s’était fixé. Elles furent englouties comme les précédentes.



Secrétaire d'État de la guerre : Le duc de Choiseul

Ordonnance du 26 juin 1763

Avec la signature, en février 1763, du traité de Paris qui met fin à la guerre de Sept Ans, il était urgent de trouver une solution pérenne à ce problème. Sous le ministère du duc de Choiseul, on proposa de créer une régie économique pour gérer l'habillement de l'ensemble des troupes. Ce fut l'objet de l'ordonnance du 26 juin 1763.

Grâce à ce système, ce ministère espérait enfin maîtriser les dépenses liées à l'habillement. Il escomptait même dégager un excédant financier permettantSoldat du régiment de Vivarais - 1767 d'une part, à venir au secours de régiments frappés accidentellement par le malheur et d'autre part, constituer des approvisionnements nécessaires pour équiper de nouvelles troupes. Les prétentions formées pour la création de cette régie économique n'étaient pas purement militaires. Elles avaient pour autre ambition de générer de l'activité auprès des fournisseurs et de leur garantir une production permanente et régulière, c'est-à-dire, sans avoir à souffrir des contraintes liées aux délais de livraison des produits généralement fixés à l'entreprise après l'obtention d'un marché.

Les fonds nécessaires à cette masse d'habillement demeurèrent fixés comme précédemment et versés mensuellement avec la solde. Ils étaient déposés dans la caisse du trésorier des guerres, chargées de payer directement les fournisseurs suivant les ordres donnés par le secrétaire d'État. Afin que ce commerce ne profita pas qu'à une poignée d'entreprises, les intendants furent chargés de communiquer à ceux qui en faisaient la demande, les échantillons ou modèles des étoffes entrant dans la confection des uniformes. Les soumissions étaient alors adressées directement au secrétaire d'État qui les acceptait ou les refusait. Ceux qui étaient retenus recevaient la visite d'un régisseur qui s'enquérait de la qualité et des prix pratiqués par la fabrique. Un compte rendu était ensuite adressé au ministre. Lorsque la fabrique avait été retenue, elle recevait un tableau des produits à réaliser et un état des marchandises à verser dans les magasins généraux et particuliers qui avaient été implantés dans tout le royaume pour faciliter les approvisionnements. Ainsi, Lodève, Lyon, Mortagne, Rouen, Paris et Metz possédaient un magasin principal, Strasbourg, Valencienne, Rennes et Lille un magasin particulier.

Les intendants étaient chargés de surveiller les approvisionnements. Les régisseurs étaient responsables de la qualité des marchandises. Celles qui avaient reçu leur agrément étaient immédiatement marquées et entreposées dans les magasins qui étaient soumis à la surveillance des commissaires des Guerres. Ce modèle de gestion offrait l'avantage de faire connaître à l'avance aux fabricants ce qu'il devait réaliser leur permettant ainsi de lisser leur production. Ils étaient payés mensuellement par les trésoriers des fournitures produites et réceptionnées. Le commissaire des Guerres, chargé de la police des magasins, dressait chaque mois un état d'entrée et de sortie des matières qu'il adressait au secrétaire d'État. Le régisseur était tenu de faire semestriellement l'inventaire des quantités en nature et en espèce de son magasin. Son traitement était fixé à 4% de commission, lui permettant de couvrir ses frais généraux et lui tenant lieu d’honoraire ou de bénéfice. Les frais de transport liés aux approvisionnements des magasins particuliers et ceux liés aux expéditions à faire aux régiments étaient imputés sur les fonds de la masse d'habillement.

Ordonnance du 20 mars 1764

Le 20 mars 1764, paru une ordonnance pour l'établissement d'une masse (1) pour l'entretien du linge et chaussure. Cette masse, financée par une retenue  sur solde, avait été supprimée en 1718 et on avait laissé aux sergents et soldats le soin de s'entretenir eux-mêmes. Les besoins n'étant plus les mêmes, on cru bon de la recréer. Elle fut fixée pour l'infanterie sur le pied de 16 deniers par jour par sergent et tambour-major et 8 deniers par caporal, appointé, grenadier, fusilier et tambour ordinaire et pour la cavalerie à raison de 16 deniers par jour par maréchal-des-logis, fourriers, brigadiers, carabinier, cavalier, hussard, dragon et tambour. Sur ces comptes créés pour chaque militaire devait subsister une somme de 15 livres qui devait servir pour des besoins imprévus. Un décompte était fait au militaire tous les quatre mois.

À cette masse s'ajoutait une masse de réparation et d'entretien (2) abondée par le trésor suivant le même principe que la masse d'entretien du linge et chaussures. Elle s'élevait à 24 livres (3) par homme et par an.



Ce modèle de gestion, qui semblait donner satisfaction, fut l'objet de ce qui parut alors être une amélioration. Dans un règlement du 24 juillet 1767, les fonds de la masse d'habillement ne furent plus déposés dans la caisse du trésorier des guerres. Les régisseurs en devinrent les dépositaires et furent chargés d'acquitter toutes les dépenses relatives à l'habillement. Pour assurer cette nouvelle charge, l'État leur accorda, en sus des 4%, une autre rétribution de 1,25% à percevoir sur toutes les dépenses. Peu scrupuleux, les régisseurs augmentèrent les dépenses au point de mener à la ruine une institution qui promettait les plus grands avantages.


(1) Cette masse servait pour l'achat  des chemises, des cols, des bas, des guêtres blanches, des souliers, des manchettes de bottes et servait à l'entretien et au remplacement des éperons, des fourreaux de sabres et de baïonnettes, des  réparations et entretien des bandoulières, cartouches et ceinturons ; de la fourniture du blanc et de la cire, pour les rubans pour leurs cheveux, les cocardes de basin blanc, les gants, pour l'entretien et le remplacement des sangles et autres équipements et objet d'entretien du cheval. Il servait également pour la fourniture des balais, pelles et fourches pour les écuries, ainsi que des lampes, chandelles et falots nécessaires aux dites écuries et à l'achat de produit d'entretien comme le cirage, le suif et l'huile pour les bottes et les cuirs de l'équipage du cheval.

(2) Cette masse servait au remplacement et réparations des culottes de peaux, des doublures des habits pour en prolonger la durée, pour payer la main- d'œuvre des ouvriers pour les raccommoder ; pour réparer les porte-manteaux, les chapeaux, mousquetons, sabres et baïonnettes, pour le ressemelage et remontage des bottes ; pour les médicamens des hommes et du cheval, du ferrage des chevaux ; du remplacement des mors de bride, selle et autres équipement du cheval, des trousse-queues, croupières et courroies de toute espèce.

(3) Par ordonnance du 15 décembre 1766 cette masse fut augmentée à 27 livres par homme et par an pour permettre de régler les faux-frais de toute nature.


Secrétaire d'État de la guerre : Le marquis de Monteynard

Règlement du 17 avril 1772

Avec le règlement du 17 avril 1772 (pdf), le marquis de Monteynard, nouveau secrétaire d'État à la guerre, supprima la régie et l'on revint aux errements antérieurs en donnant à chaque régiment la liberté de choisir ses fournisseurs et d'acheter les marchandises qu'il jugerait nécessaires au service. Des formalités administratives furent adaptées à ce nouveau système. Le choix des matières, les confections et réparations furent, dans chaque régiment, confiées à un officier choisi parmi les capitaines.

Le résultat de ces nouvelles dispositions fut, comme il fallait s'y attendre, catastrophique. Ce système obligeait le régiment à détourner de son service un officier presque continuellement pour qu'il se livre à des spéculations commerciales pour lesquelles il n'avait aucune notion. Bien souvent, cet officier, élu par ses pairs pour accomplir une mission qu'il exécutait sans enthousiasme, compromettait financièrement le corps par son inexpérience. Il n'y eut besoin d'une longue expérience pour démontrer l'absurdité d'un semblable système. S'il nuisait aux finances de l'État, il devint également préjudiciable à l'industrie et à la prospérité des grandes manufactures en laissant les fabricants dans l'incertitude de commandes subordonnées à la volonté des régiments. Trois ans plus tard, la faculté des achats laissée aux régiments par le règlement de 1772 fut supprimée.

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Louis XVI (1774 – 1792)    (audio : 40'15)

Secrétaire d'État de la guerre : Le maréchal Dumuy

Ordonnance du 4 juillet 1775

Sous le ministère du maréchal Dumuy, une ordonnance du 4 juillet 1775 (pdf) rétablissait en régie l'administration de la masse destinée à l'habillement et l'équipement des troupes. Des mesures furent prises pour encourager le plus grand nombre de fabricants à concourir à la confection des effets militaires. Les régiments eurent interdiction de passer des marchés pour l'habillement. Ils cessèrent de recevoir les fonds de cette masse et durent verser au secrétaire d'État de la guerre ceux qui se trouvaient encore dans leur caisse.

Les régisseurs nouvellement créés furent chargés d'envoyer des échantillons à tous les fabricants désireux de concourir. Ils étaient personnellement responsables de la qualité de la fourniture. Si l'offre était jugée convenable tant sur la qualité que sur le prix, il la soumettait à l'agrément du secrétaire d'État pour obtenir son exécution. Les draps reçus dans les magasins étaient alors revêtus du cachet de réception de l'inspecteur désigné à cet effet. Chaque magasin d'approvisionnement et entrepôt était placé sous la police d'un commissaire des guerres qui gérait les entrée et sortie des matières.Cavalerie légère suivant l'ordonnance de 1778

Secrétaire d'État de la guerre : Le comte de Saint-Germain

Ordonnance du 25 mars 1776

Les bienfaits de ce système éprouvé au cours de l'année précédente avaient-ils commencé à poindre que le maréchal Dumuy mourut quelques mois plus tard. Il fut remplacé par le Comte de Saint-Germain qui s'empressa de défaire ce que son prédécesseur venait de mettre en place. Les arcanes de la politique conjuguée à l'orgueil des hommes étant ce qu'ils sont, le ministre, dans une ordonnance du 25 mars 1776 (pdf), ordonna la suppression de la régie qu'il remplaça par un conseil d'administration qui fut créé dans chaque régiment de cavalerie, d'infanterie, de dragons et de hussards. On changea à nouveau les règles d'administration de cette masse qui prit le nom de « masse générale ». Elle était destinée à subvenir à toutes les dépenses concernant les recrues, l'habillement, l'entretien, les réparations, les remontes. Son taux fut fixé à 36 livres par homme et par an pour l'infanterie française, à 72 livres pour l'infanterie étrangère, à 128 livres pour la cavalerie, à 122 livres pour les dragons et les hussards. Ces fonds étaient augmentés de la retenue sur solde pour le linge et les chaussures (seize deniers par sergent et fourrier et huit deniers pour tous les gradés inférieurs et soldats). L'ensemble des fonds de cette masse étaient versés mensuellement, en même temps que la solde, dans la caisse des régiments.

Le motif qui avait présidé à la création d'une caisse unique pour financer toute sorte de dépenses était la confiance que le ministre avait placée dans les officiers des conseils d'administration qui, pensait-il, administreraient paternellement cette caisse. Dans cette vue, on confia le soin des achats des étoffes à leur sagesse. Ils eurent l'entière direction de cette importante partie du service et le droit d'acquitter aux fournisseurs et marchands la dépense résultant des achats d'habillement. Pour témoigner de sa pleine confiance envers ces nouveaux gestionnaires, le ministre abrogea même dans son ordonnance les dispositions antérieures relatives à la durée de vie des effets pour s'en remettre au seul jugement du conseil d'administration.

Dans un souci d'uniformité, un règlement interne du 31 mai 1776 statua qu'il serait envoyé à chaque régiment un modèle d'habillement confectionné.



Secrétaire d'État de la guerre : Le comte de Montbarrey

Maréchaussée : Ordonnance du 28 avril 1778

Le modèle de gestion, imposé aux régiments par le comte de Saint-Germain, fut transposé à la maréchaussée par le nouveau secrétaire d'État de la Guerre, le comte de Montbarrey. Dans la grande ordonnance du 28 avril 1778, le roi ordonnait la création d'un conseil d'administration dans chaqueLe comte de Montbarey compagnie à la manière de ceux institués dans les régiments par l'ordonnance du 23 mars 1776. Ce conseil devait traiter des aspects économiques relatifs à la remonte, au harnachement, aux fourrages, à l'habillement et à l'équipement. La couronne abondait annuellement la masse d'habillement (pdf - extrait) des sommes suivantes : pour chaque maréchal des logis : 45 livres; chaque brigadier : 42 livres; chaque cavalier : 40 livres et chaque trompette : 30 livres. Cette masse était destinée aux effets d'uniforme dont le renouvellement s'effectuait tous les deux ans.

L'entretien du linge, des culottes, bas, bottes, souliers des cavaliers ainsi que le paiement des ferrages et entretien des équipages de leurs chevaux étaient assurés par une retenue journalière sur leur solde (pdf - extrait) de deux sous. Cette retenue était pratiquée par les commandants de brigade ( maréchal des logis ou brigadiers-chefs ) qui devaient remettre aux cavaliers les sommes nécessaires pour ces achats. Ils devaient veiller à l'utilisation de ces fonds et faire le décompte tous les quatre mois à chaque cavalier.

Règlement du 21 février 1779

Il ne fut nullement besoin de recourir à un vaticinateur pour prédire le résultat qu'allait produire ce modèle de gestion au sein des régiments. Trois années suffirent pour en démontrer toute l'absurdité. En laissant aux régiments la faculté de renouveler l'habillement à volonté, la gestion en bon père de famille, espérée par le ministre Saint-Germain, tomba vite en déconfiture et les dettes considérables qui s'accumulèrent devinrent très préjudiciables aux intérêts de l'État.

On crut pouvoir, dans un règlement du 21 février 1779, endiguer cette dérive en simplifiant au mieux l'uniforme et en remettant en usage la durée des objets dont le renouvellement ne pourrait être effectué que tous les trois ou six ans. Hélas, cette mesure de bon sens, qui n'aurait jamais dû être supprimée, ne fut pas suffisante pour sortir de cette traverse.



Secrétaire d'État de la guerre : Le marquis de Ségur

Ordonnance du 19 décembre 1784

Cette gabegie prit fin sous le ministère du maréchal Ségur. Avec l'ordonnance du 19 décembre 1784 (pdf), on revint à une administration de régie semblable à celle de 1775. Si le but principal de ce modèle de gestion demeurait toujours la maîtrise financière pour l'habillement et l'équipement des troupes, il avait pour autre ambition d'assurer un développement pérenne pour l'industrie et les manufactures chargées de fabriquer ces objets et de stabiliser le commerce relatif à ces derniers.

Pour parvenir à équilibrer les comptes, il fut décidé de distraire de la masse générale et pour toutes les troupes, deux sols par jour, par sous-officier et soldat. Désormais, la régie n'adressait plus au régiment la quantité d’étoffe de tout type (drap, tricot, serge, cadis) qu'il réclamait, mais celle correspondant à la somme totale des deux sous perçue sur la solde des hommes du régiment. Les conseils d'administration, mis en place précédemment, continuèrent de faire façonner l'habillement avec lesdites étoffes. L'état des dépenses, résultant de cette confection, était adressé à l'inspecteur pour approbation puis transmis au secrétaire d'État pour son paiement. Pour éviter des facturations fantaisistes de la part des maîtres tailleurs, un règlement du 1er octobre 1786 fixait le tarif pour la confection de chaque partie de l'habillement. La gestion matérielle concernant la réception des produits, leur transport, les besoins des régiments ...etc. fut similaire à celle réglée par l'ordonnance du 24 juillet 1767.



Secrétaire d'État de la guerre : Le Comte de Brienne

Ordonnance du 17 mars 1788

La gestion de la masse d'habillement fut jusqu'alors successivement confiée tantôt aux régiments tantôt à une régie. L'expérience montraOfficier de chasseur à pied - 1789 que ces deux modèles d'administration n'avaient pas réellement offert le résultat avantageux que l'on en attendait. Il était désormais important de mettre en place un nouveau modèle de gestion pour mettre fin aux effets néfastes de chacun de ces deux systèmes. C'est dans cette intention que fut rendue l'ordonnance du 17 mars 1788 (pdf) suivant laquelle la régie fut supprimée et remplacée par un directoire de l’habillement et de l'équipement des troupes. Ce directoire était composé d'un officier général, d'un officier chargé du titre d'inspecteur et de deux commerçants ayant de solides connaissances dans la fabrication des tissus. Afin d'éviter toute nouvelle dérive, les salaires versés aux membres de ce directoire étaient fixes et indépendants de la masse d'habillement.

Pour abonder la caisse destinée au service de l'habillement, il fut décidé de prélever sur les fonds de la masse générale une somme correspondant au renouvellement du complet de chaque homme. Le montant de cette retenue fut fixé à huit deniers pour l'infanterie et les hussards, dix deniers pour l'infanterie légère, la cavalerie et les dragons, un sou pour les chasseurs, onze deniers pour l'artillerie, le corps des mineurs et les compagnies d'ouvriers. Le directoire fut spécialement chargé de l'approvisionnement des étoffes qu'il fournissait aux régiments pour la réparation ou le remplacement de l'habillement. Toutes les autres parties de l'habillement et de l'équipement étaient achetés par les soins des conseils d'administration des régiments sur le surplus de la masse générale.

Dans le dessein de ne pas renouveler les errements antérieurs, cette nouvelle gestion entraîna la création de nombreuses instructions sur la comptabilité de l'habillement incluant de nombreux détails jusqu'alors négligés. Ainsi, un règlement du 20 juin 1788 imposa que tous les effets d'habillement fussent timbrés de l'année de leur confection.

Ce fut la première fois qu'un officier supérieur fut personnellement chargé de cette direction. Devenu comptable des matières, il tenait à cet effet un registre sur lequel il portait le compte en deniers et celui des effets.



Secrétaire d'État de la guerre : Louis Le Bègue Du Portail

Maréchaussée : décret du 16 janvier 1791

Au cours de la période révolutionnaire, la maréchaussée fut renommée gendarmerie nationale. Dans un décret du 16 janvier 1791 (pdf - extrait) concernant son organisation, il fut créé dans chaque division, un conseil d'administration placé sous l'autorité du colonel commandant la division. Ce conseil était chargé de fixer les retenues à faire sur les sous-officiers et gendarmes et de l'emploi de la masse. Les traitements et appointements étaient fixés à 6000 livres pour le colonel, 3600L pour le lieutenant-colonel, 2600L pour le capitaine, 1800L pour le lieutenant, 1100L pour le maréchal des logis, 1000L pour le brigadier monté, 900L pour le gendarme monté, 600L pour le brigadier non monté, 500L pour le gendarme non monté et 600L pour le secrétaire-greffier. Avec cette solde, les officiers, sous-officiers et gendarmes devaient se monter, s'habiller, s'équiper et pourvoir à la nourriture et à l'entretien de leur cheval.

La retenue journalière de deux sous sur la solde pour l'entretien du linge, des culottes, bas, bottes, souliers des cavaliers ainsi que le paiement des ferrages et entretien des équipages de leur cheval fut supprimée. Elle fut remplacée par une masse de 360 livres versée annuellement par la caisse publique pour chaque brigade à cheval sous forme de supplément pour l'entretien de l'habillement, la remonte et l'équipement des chevaux. Cette masse était de 100 livres pour les brigades à pied. Les avances faites par cette caisse aux maréchaux des logis, brigadiers et gendarmes étaient remboursées par une retenue sur solde fixée par le conseil d'administration.

Loi du 11 février 1791

L'entretien des hommes et des chevaux du corps de la gendarmerie ayant été réglé, l'Assemblée nationale légiféra pour les autres parties de l'armée. Ce fut l'objet de la loi du 11 février 1791 (pdf) qui modifia l'ancienne fixation des masses destinées à l'entretien des différents corps. Les fonds destinés à l'entretien des régiments étaient calculés par homme et dans la proportion relative à chacune des dépenses. Ils étaient payés sous le nom de masses générales, masses de boulangerie, masses de fourrages, masses des hôpitaux, masses des effets de campement, masses des bois et lumières. Les masses générales étaient destinées à subvenir aux remplacements d'habillement et d’équipement; au recrutement et aux rengagements; aux réparations d'habillement, d’armement, d’équipement et aux dépenses communes d’administration. Leur montant variait en fonction de la spécificité de chaque arme. Les fonds alloués par homme se subdivisaient en deux portions pour l'infanterie. La première était destinée à l'achat de l'habillement et de l'équipement, la seconde aux réparations et dépenses communes. Pour la cavalerie, le fond plus important se subdivisait en quatre portions. Les deux premières étaient identiques à celles de l'infanterie et les troisième et quatrième portions étaient destinées pour l'une à l'équipement du cheval, pour l'autre à son entretien.

Les fonds ainsi formés étaient partagés entre les conseils d'administration des régiments et le directoire. Ceux confiés au directoire étaient destinés à l'habillement et à l’équipement des troupes. Ils servaient à l'achat des tissus et boutons entrant dans la confection des habits, vestes, culottes, surtouts, gilets d'écurie, manteaux, porte-manteaux, housses, pelisses, dolmans, culottes à la hongroise et bonnets de police; des casques en feutres pour l'infanterie de ligne et les chasseurs à cheval; des casques en cuivre pour les dragons; des bonnets pour les grenadiers et carabiniers; des sabretaches pour les hussards; des sabres et ceinturons pour toute l'armée; des gibernes, porte-gibernes et banderole; des bretelles de fusils, mousquetons et carabines; des caisses et des colliers pour les tambours. Les objets à la charge de la deuxième portion étaient destinés à la confection et réparation des effets d'habillement ainsi qu'à la confection et réparation de certaines parties de l'équipement des chevaux, à l'achat du linge, chaussures, bottes, chapeaux, galons, plumets, épaulettes, des brides et des selles. Cette masse de réparation et de dépenses communes était administrée par les conseils d'administration des régiments.

Une instruction du 1er avril modifia légèrement cette répartition en mettant à la charge de la masse de remonte, la fourniture des gants dits à crispin, le remplacement et l'entretien des bridons d'abreuvoir, des licols, sangles, surfaix, longes, cordes à fourrage et sacs à avoine.

Bataillon de la garde nationale : loi du 4 septembre 1791

La tourmente, dans laquelle était plongé le royaume, amena l'Assemblée nationale législative à devoir habiller et équiper promptement des bataillons de garde nationale dans des circonstances impérieuses. Une levée considérable de troupes, faites sous le signe de l'urgence, ne permit pas de pourvoir à des besoins aussi nouveaux qu'inattendus. Les magasins de l'État, destinés à approvisionner les troupes existantes, ne furent pas en capacité d'habiller et d'équiper les nouvelles. On estima que ces corps nouvellement créés ne pourraient gérer l'habillement de la même manière que les anciens régiments, c'est-à-dire par la voie du directoire. On décida alors de leur laisser le soin de gérer l'ensemble de la chaîne de l'habillement et de l'équipement en les autorisant à prélever par jour et par homme 15 sols. Bientôt, l'inexpérience de ses nouveaux chefs militaires et de ses commissaires des guerres, les mouvements incessants qui s'opéraient alors dans l'armée et le discrédit du papier-monnaie rendit se prélèvement impossible.

Il fut alors décidé, par une loi du 4 septembre 1791, que l'habillement des volontaires serait fourni par les administrations de district. La plus grande partie de ces bataillons ayant été mis sur pied, un décret du 29 mars 1792 détermina qu'à l'avenir, l'équipement des nouveaux bataillons serait fait par le directoire de l'habillement.



Secrétaire d'État de la guerre : Le Comte de Narbonne-Lara

Règlement du 1er janvier 1792

Le modèle de gestion mis en place dans les armées ayant donné satisfaction, on crut bon de l'améliorer avec un règlement paru le 1er janvier 1792. Sur le plan de la régularité, tous les sous-officiers et soldats furent tenus de posséder un livret sur lequel étaient détaillées toutes les parties de leur habillement et équipement. Sur le plan des économies, on décida de supprimer l'officier supérieur chargé des détails de l'habillement et de lui substituer un capitaine secondé par un autre officier.

Une instruction particulière de la même date précisait la mission de cet officier. Les dispositions qu'elle contenaient laissaient entrevoir le désir de soumettre toutes les parties de ce service à une surveillance de tous les instants. Ainsi, pour éviter les vols, il devait être établi dans la caserne de chaque régiment un magasin pour y déposer les draps, étoffes et tous les effets d'habillement ou d'équipement façonné ou non. Les ateliers de confections devaient être placés près des magasins de sorte que les capitaines d'habillement puissent contrôler l'usage des matières. Pour s'assurer de leur suivi, les opérations de coupe et d'assemblage faisaient ensuite l'objet d'un enregistrement au journal.

Le capitaine d'habillement devait faire prendre les mesures aux hommes et faire connaître au maître tailleur les tissus à employer suivant des échantillons d'étoffe qu'il avait à sa disposition et les modèles d'habillement. L'habillement neuf devait être essayé en sa présence et il devait faire réparer sur le champ et aux frais du maître tailleur, tout ce qui n'était pas conforme. Pour éviter toute canaillerie, le salaire du maître tailleur demeurait réglé par le règlement de 1786 qui avait fixé pour chaque effet le prix de son façonnage.

 Tous les effets ainsi réalisés étaient marqués du numéro matricule de l'homme et de l'année de sa confection. Le capitaine était également chargé, au cours des revues, de déterminer les parties d'habillement qui devaient être réparées, retournées ou remplacées et devait planifier ces opérations pour lisser l'activité de l'atelier de confection.

Pour suivre ces travaux, un état nominatif de situation était arrêté par le capitaine d'habillement et par le commandant de chaque compagnie.



Dans ce moment de l'histoire, on assista à l'établissement de deux administrations différentes pour deux espèces de troupes. La ligne avait des masses fixes et se trouvait habillée aux frais de l'état. Les bataillons de nouvelles levées étaient soumis à l'ancien mode des retenues et recevaient l'habillement en nature des autorités civiles.

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La convention nationale (1792 - 1795)    (audio : 58'55)
Ministre de la guerre : colonel Pierre Auguste Lajard

Règlement du 25 juin 1792

En considération d'utilité publique, on substitua à l'établissement du directoire une administration chargée de pourvoir à la fourniture de toutes les marchandises. Avec le règlement du 25 juin 1792, cinq administrateurs et deux inspecteurs, auxquels on attribua un traitement fixe, furent alors nommés. Les administrateurs, chargés des achats, étaient autorisés à recevoir les soumissions et à passer les marchés après avoir été approuvés par le ministre. Le montant de la masse restait identique à celui qui avait été fixé précédemment. On pourvut aux frais d'administration en prélevant sur cette masse une somme de deux sols par aune de chaque espèce d'étoffe qui était achetée et autant sur les effets d'équipement, de petit équipement et de campement. Il avait été prévu que, dans le cas où le produit de ces frais serait supérieur à l'estimation faite, le complément serait payé annuellement par le gouvernement. Comme sous le ministère Choiseul, les dérives de ce système consistant à allouer des sommes au prorata d'actions ou de produits ne tardèrent pas à voir le jour.

L'influence des inspecteurs sur les administrateurs semble avoir eu des conséquences néfastes sur ce modèle de gestion. En effet, ces agents, qui n'étaient retenus par aucune responsabilité pour fautes personnelles, étaient chargés de faire la tournée dans les provinces afin de susciter l'émulation entre fabricants et de procéder à la réception des marchandises. Leur mainmise sur cette partie de l'approvisionnement favorisa la corruption. sous-officier_artillerie_1793



Ministre de la guerre : Lt-colonel Jean-Baptiste Bouchotte

Règlements du 31 mars et 12 avril 1793

Lorsque le lieutenant-colonel Bouchotte fut nommé ministre de la Guerre par la Convention nationale, la loi consacrée toujours une distinction dans le régime de l'habillement entre les bataillons de la garde nationale et la troupe de ligne. Les forces armées du pays se retrouvaient ainsi scindées en deux catégories. Celles d'ancienne création, qui avaient des masses fixes et trouvaient leur conduite administrative dans le règlement du 25 juin 1792, étaient habillées par l'état. Celles nouvellement levées, soumises aux dispositions de la loi du 4 septembre 1791 qui leur imposait de subir une retenue, continuaient de recevoir leur habillement par les soins des administrateurs de district. Cette retenue, qui dans la réalité ne s'opéra jamais, fut cependant l'objet de nombreux abus.

Afin de corriger les défauts du règlement du 25 juin 1792 et ceux de la loi du 4 septembre 1791, deux nouveaux règlements vinrent modifier ces textes. Celui du 31 mars 1793, en faveur des volontaires, devait assurer la perception de la retenue et simplifier leur comptabilité. Le second du 12 avril suivant concernait la ligne et déterminait que l'habit serait désormais livré confectionné. Les masses des corps d'anciennes et de nouvelles créations demeuraient à la disposition du ministre.



La commission du commerce

Décret du 12 germinal an II

Ce nouveau système, qui embrassait plusieurs autres dispositions de détail, aurait pu produire des améliorations, si les évènements et si les circonstances n'eussent pas successivement provoqué le désordre le plus complet au niveau du gouvernement. C'est au milieu de ce chaos que par un décret du 12 germinal an II (pdf) (1er avril 1794) (1), le conseil exécutif ainsi que les ministres qui le composaient fut remplacé par douze commissions. À celle du commerce appartint le soin des fournitures des effets d'habillement et d'équipement. Chaque commission reçue par la loi du 1er messidor an II (20 juin 1794) une dotation de 195 millions de francs. Le manque de coordination entre ces commissions et leur instabilité fut très préjudiciable à l'armée. Des changements dans ce modèle d'administration étaient inévitables.

Loi du 2 thermidor an II

Dans un rapport fait à la Convention nationale, au nom des comités de salut public, des finances, de l'examen des marchés et de la guerre, il fut exposé que le grand désordre qui régnait dans la comptabilité des troupes était dû en grande partie aux abus pratiqués dans les retenues et rappel de solde. Cette pratique qui engendrait la défiance des soldats envers leur chef était bien souvent à l'origine des désertions et insurrections dans les armées lorsque les soldats n'obtenaient pas de leurs officiers les décomptes de ces retenues. Alors intervint la loi du 2 thermidor an II (pdf) (20 juillet 1794) (2) relative à la solde (3) des troupes qui supprima la masse d'habillement et le système des retenues et organisa une nouvelle gestion plus adaptée aux besoins de l'armée. Les effets d'habillement, d'équipement, de linge et de chaussure furent fournis par les magasins de la république, sans aucune retenue. Les officiers devaient s'habiller et s'équiper à leurs frais.

Les conseils d'administration, chargés des dépenses d'entretien, étaient responsables du bon emploi des sommes qui leur étaient affectées. Il devait justifier ses déboursés qui ne devaient jamais excéder l'avance. Le montant de la masse destinée à l'entretien fut sérieusement augmenté, car il était bien inférieur aux besoins. Ainsi, la masse d'entretien fixée mensuellement à 20 sous pour chaque homme d'infanterie et à 30 sous pour chaque cavalier fut revalorisée à 2 livres 5 sous pour l'infanterie et 4 livres pour la cavalerie.

Le renouvellement des effets ne s'effectua qu'en fonction de la durée de vie qui leur fut affectée par la loi du 2 fructidor an II (pdf) (19 août 1794) relative à l'habillement et l'équipement des troupes de la république. L'entretien de ces effets fut confié au soin des conseils d'administration des corps au moyen des fonds destinés à cette dépense. Cependant, les nouvelles quotités fixées par la loi du 2 thermidor an II devinrent insuffisantes. L'accroissement prodigieux des troupes, ses mouvements rapides et le discrédit du papier-monnaie eurent raison de cette disposition et des dépenses énormes étaient englouties pour maintenir l'habillement à un niveau acceptable.

La création des commissions avait anéanti l'unité du système de cette importante administration. Il devenait important de réformer en profondeur ce modèle de gestion. Une loi du 17 nivôse an III (pdf) (6 janvier 1795) supprimait la commission de commerce et approvisionnement et créait une nouvelle commission sous le nom de commission des approvisionnements. Cette dernière était chargée des subsistances et autres fournitures des armées de terre et de mer. Hélas, les trois commissaires de cette commission s'isolèrent dans leur travail et le désordre s'installa à nouveau. La réforme de ce système était devenue impérative.


(1) Le calendrier républicain, utilisé de 1792 à 1806, entra en vigueur le 15 vendémiaire an II (6 octobre 1793), mais débuta le 1er vendémiaire an I (22 septembre 1792).

(2) Cette loi consacrait le terme de « solde » pour désigner les salaires accordés aux militaires, quel que soit leur grade. Les dénominations d'appointement et de traitement étaient supprimées. Le mot appointement était utiliser pour désigner le salaire des officiers. Dans l'ancien système, la vénalité des charges s'étendait à l'armée et les emplois d'officier s'achetaient. L'appointement correspondait au salaire annuel attaché à une place ou un emploi. Les lois suivantes maintiendront malgré tout le terme de traitement pour le salaire des officiers et de solde pour les sous-officiers et hommes du rang.
Par décrets des 28 février, 31 mars et 18 avril 1790, toutes vénalités des emplois et charges militaires furent supprimées.

(3) En 1190 Philippe Auguste partant pour la Palestine fit paraître une ordonnance qui attribuait un sol par jour à chaque homme de pied devant prendre part à la croisade. Telle est l'origine du mot solde qui donna soldat pour celui qui en est le bénéficiaire.

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LE directoire (26/10/1795 - 9/11/1799)     (audio : 1h06)
Ministre de la Guerre : général Aubert-Du-Bayet

Décret du 11 ventôse an IV

Par une série d'arrêtés du 12 et 13 brumaire an IV (3 et 4 novembre 1795), le directoire exécutif rétablissait les ministères. Le général Aubert de Bayet, général en chef de l'armée des côtes de Cherbourg était nommé ministre de la guerre (pdf). Les ministères étaient réorganisés et retrouvaient leurs bornes naturelles. Le 11 ventôse an IV (1 mars 1796), un décret supprimait l'ancienne organisation des approvisionnements pour la remplacer par un bureau central établi sous les ordres immédiats du ministre. L'émiettement des achats et le défaut d'uniformisation qui avaient présidé jusqu'alors furent abandonnés et le gouvernement traita directement avec des entrepreneurs généraux qui se chargèrent de la fourniture, de la confection des matières et du transport aux armées de tous les effets confectionnés. Réorganisé et parfaitement hiérarchisé, le service des approvisionnements avait permis le retour à la stabilité et à l'économie.



Ministre de la Guerre : général Barthélemy Scherer

Gendarmerie : loi du 28 germinal an VI

Avec la loi du 28 germinal an VI (pdf) (17 avril 1789), la gendarmerie revint au modèle de gestion qui lui fut toujours attaché et qui consistait à verser aux officiers, sous-officiers et gendarmes un salaire leur permettant de faire face à toutes les dépenses personnelles et de service. Désormais payé en franc, le traitement des officiers était fixé annuellement à 7000 f. pour le colonel, 4200 f. pour le chef d'escadron, 3000 f. pour le capitaine, 2000 f. pour le lieutenant. Au moyen de ce traitement, ils étaient tenus de pourvoir à leur logement, à leur nourriture, à celle de leurs chevaux, à leur entretien, ainsi qu'à leurs frais de courses et de voyages.

La solde des sous-officiers et gendarme était payée sur le pied de 1500 f. pour le maréchal des logis-chef, 1400 f. pour le maréchal des logis, 1300 f. pour le brigadier, 1080 f. pour le gendarme. Avec cette solde, ils devaient se monter, s'habiller, s'équiper et pourvoir à leur subsistance, à la nourriture, au ferrage, à l'équipement et à l'entretien de leurs chevaux.

La masse de 300 livres, instituée par le décret du 16 janvier 1791, versée annuellement par la caisse publique pour chaque brigade à cheval sous forme de supplément pour l'entretien de l'habillement, la remonte et l'équipement des chevaux, fut supprimée. Elle fut remplacée par une masse de 300 f. que les sous-officiers et gendarmes devaient se constituer et toujours avoir en dépôt à la compagnie, pour parer aux pertes qui pourraient subvenir et aux remplacements jugés nécessaires. Une masse de secours extraordinaire, abondée par un prélèvement annuel de 15 f. sur la solde était également constituée. Elle était destinée à faire face aux frais de bureaux et à indemniser les sous-officiers et gendarmes qui pourrait subit des pertes en service sans qu'il y ait faute de leur part (exemple : vêtement déchiré au cours d'une arrestation).

Enfin, pour assurer la subsistance du cheval, une somme de 365 f. était prélevée annuellement sur la solde. Cette somme était versée par douzième, chaque mois, dans la caisse des fourrages de la compagnie.

 

Ministre de la Guerre : général Jean-Baptiste Bernadotte

Loi du 26 fructidor an VII

Avec l'esprit d'ordre et d'économie qui régnait depuis trois ans dans ce département, la confiance revenue avec le numéraire que l'on substitua au papier-monnaie, il devenait important pour l'économie publique que les fonds à faire pour chaque branche du service fussent déterminés. L'expérience du passé ayant démontré l'avantage du système des masses, celles-ci furent rétablies. La loi du 26 fructidor an VII (pdf) (12 septembre 1799) consacra les dispositions de ce nouvel ordre. Pour éviter tout dérapage, elle prit soin de séparer nettement les crédits affectés à chacune d’entre elles. Son article 3 est d'ailleurs, conçu dans les termes suivants : « si les fonds accordés pour un objet se trouvaient insuffisants, il sera pourvu au déficit par une loi particulière sur le compte qui en sera rendu au Corps législatif; mais dans aucun cas et sous aucun prétexte, les fonds d’un abonnement ne pourront être employés à une autre destination que celle qui sera donnée par la loi qui ouvrira un crédit au ministre de la Guerre ». Les dépenses furent divisées en neuf abonnements sous les dénominations de masse de boulangerie, des fourrages, des étapes, du chauffage, du logement, des hôpitaux, de l'habillement, de l'entretien et des remontes.

Avec la masse d'habillement et d'équipement, le ministre de la guerre faisait fournir à chaque corps les étoffes et marchandises nécessaires à l'habillement, au grand équipement et au harnachement des chevaux (1). Les conseils d'administration, destinataire de la masse d'entretien (2), étaient chargés de la confection des effets d'habillement et leur entretien, de la fourniture d'effets de petit équipement, de l'entretien des armes et de régler les frais de bureau. Une masse particulière appelée linge et chaussure permettait de fournir à chaque sous-officier et soldat arrivé au corps les chemises, bas, guêtres, souliers et autres effets de petit équipement. Une retenue sur solde de 8 centimes par sous-officier et 5 centimes par hommes du rang abondait cette masse.


(1) Cette masse était réglée à vingt-cinq francs pour chaque sous-officier et soldat d'infanterie de ligne, à vingt-sept francs pour l'infanterie légère, à trente francs pour l'artillerie à pied, ouvriers, mineurs, sapeurs et pontonniers ; à quarante-sept francs pour les carabiniers, à quarante-quatre francs pour la cavalerie , à quarante-cinq francs pour les dragons, à quarante-six francs pour les chasseurs et les canonniers à cheval, et à cinquante francs pour les hussards (art. 24).

(2) Le fonds d'entretien était fixé à huit francs par homme dans l'infanterie de ligne, à neuf francs dans l'infanterie légère, à huit francs cinquante centimes pour l'artillerie à pied, ouvriers, mineurs, sapeurs et pontonniers; à treize francs vingt centimes pour la cavalerie et les dragons, et à douze francs vingt centimes pour les chasseurs, hussards et canonniers à cheval. Cette masse, formée par retenue sur solde, était versée aux conseils d'administration à l'occasion du paiement des soldes.

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LE consulat (9/11/1799 - 18/5/1804)   (1h11)
Ministre de la Guerre : Lazare Carnot

Arrêté du 8 floréal an VIII

Sur le rapport de Lazare Carnot, ministre de la Guerre, les consuls de la république, dans un arrêté du 8 floréal an VIII (pdf) (28 avril 1800) contenant règlement sur l'administration et la comptabilité des corps, conservèrent aux conseils d'administration des corps lesAide de camp de général de brigade - 1803 fonds des masses d'entretien et de linge et chaussure établies par la loi du 26 fructidor an VII.

Les masses de boulangerie, des étapes, du chauffage, du logement, des hôpitaux, de l'habillement et du grand équipement et celle de la remonte, établies par la même loi furent mises à la disposition du ministre. À ces masses on créa une masse particulière pour les dépenses relatives aux chevaux qui prit le nom de masse de ferrage et de médicament.

La masse d'entretien, dont le montant avait été réglé par la loi du 26 fructidor an VII, était destinée à payer la confection des effets d'habillement et d'équipement, les réparations desdits effets, les réparations de l'armement, les frais de bureau et autres dépenses communes.

La masse de linge et chaussure continuait d'être formée par une retenue de huit centimes sur la solde des sous-officiers à l'exception des adjudants, et de cinq centimes sur celle de chaque caporal, grenadier, fusilier et chasseur dans l'infanterie, l'artillerie et autres troupes à pied, et de huit centimes par chaque maréchal des logis, brigadier, cavalier, carabinier, dragon, hussard, chasseur et canonnier à cheval. Ces fonds étaient particulièrement affectés au paiement de tout ce qui concerne le petit équipement de l'homme, comme les souliers, bas, guêtres, chemises, cols, mouchoirs, et autres objets de cette nature.

Arrêté du 9 thermidor an VIII

Trois mois plus tard, par un arrêté du 9 thermidor an VIII (pdf) (28 juillet 1800), on apporta un changement en créant un directoire de l'habillement composé de trois directions sous les ordres immédiats du ministre directeur. Les membres de ces directions ne pouvaient faire aucun achat et se contentaient de passer des marchés qu'ils soumettaient ensuite à l'approbation du ministre. Les inconvénients de ce mode de gestion apparurent bien vite. Au coût élevé des marchandises, il fallut rajouter ceux importants du fonctionnement de ces trois directions et celui du transport.

Un autre défaut apparu, celui de l'expertise des marchandises achetées. En effet, jusqu'au décret de l'an IV, les étoffes et marchandises achetées étaient regroupées dans des magasins généraux qui les redistribuaient ensuite aux régiments. Cette centralisation permettait de vérifier avec une grande expertise la qualité des produits achetés. Pour parer à leur suppression, il avait été réglé que les membres du directoire feraient des tournées pour inspecter les fabriques, mais ces inspections n'eurent que peu d'effet et les marchandises directement expédiées aux régiments échappaient à toute vérification.

Arrêté du 23 fructidor an VIII

L'arrêté du 23 fructidor an VIII (pdf - extrait) (10 septembre 1800) introduit plus de précision dans la destination des fonds servant à la fourniture des troupes. Maintenu sous la dénomination de masses, ils furent répartis en neuf catégories pour les troupes à pied et douze pour les troupes à cheval. Pour les troupes à pied, ces masses étaient la boulangerie, les étapes, le chauffage et ustensile de campement, le logement et casernement, le campement, les hôpitaux, l'habillement et équipement militaire, l'entretien et confection et les premières fournitures de petit équipement, le linge et chaussure. Ces masses étaient augmentées de celles des fourrages, des remontes et des ferrages, pour les troupes à cheval.

La gestion de ces masses était répartie en trois classes. Celle gérée par les corps et qui comprenait les masses de chauffage et d'ustensiles de campement, d'entretien, de confection et de première fourniture de petit équipement, de linge et chaussure, de remonte et de ferrage. Celle administrée par le ministre avec le concours des conseils d'administration et dans laquelle étaient rangées les masses de boulangerie, des hôpitaux, d'habillement et d'équipement militaire et de fourrages. Enfin la troisième classe qui restait entre les mains du ministre qu'il administrait seul et dans laquelle on retrouvait les masses d'étapes, de logement et casernement et de campement.



Ministre de la Guerre : général Louis-Alexandre Berthier

Arrêté 17 frimaire an 11

Avec l'arrêté du 17 frimaire an XI (pdf) (8 décembre 1802), les consuls décidèrent qu'à compter du 1er vendémiaire de l'an XI (3 septembre 1802), la masse d'habillement et celle d'entretien seraient, pour les troupes à pied, réunies sous le titre de masse générale. À compter de la même date, les troupes à cheval réuniraient sous la même dénomination la masse d'habillement, celle d'entretien et celle de ferrage.

Cette masse était divisée en deux portions : la première (1), destinée à l'habillement proprement dit, était administrée par le ministre directeur de l'administration de la guerre d'après les dispositions de l'arrêté du 9 thermidor an VIII; l'autre (2) , destinée à la confection, aux réparations et autres dépenses, était comptée aux corps qui devait se conformer aux dispositions prescrites dans cet arrêté et dans celles fixées par les arrêtés des 8 floréal an VIII et 13 brumaire an X.


(1) Première portion. Infanterie de bataille et vétérans, dix-huit francs; infanterie légère, douze francs; artillerie à pied , ouvriers, sapeurs, mineurs, pontonniers, canonniers, vétérans, vingt francs; carabiniers et cuirassiers, cavalerie et dragons, vingt-trois francs ; chasseurs et artillerie à cheval, seize francs; hussards, vingt-quatre francs; train d'artillerie, dix-neuf francs.

(2) Deuxième portion. Infanterie de bataille et vétérans, dix-sept francs; infanterie légère, vingt-trois francs; artillerie à pied, pontonniers, ouvriers d'artillerie, canonniers, vétérans, sapeurs et mineurs, dix-neuf francs ; carabiniers, cuirassiers, cinquante-un francs.




Depuis le début de cette grande aventure qui consista à vêtit les troupes d'un costume uniforme avec des caractéristiques particulières pour les distinguer les unes des autres, on constate que les gouvernements, dans le but d'obtenir l'ordre et l'économie, n'ont cessé de porter leur choix entre deux systèmes de gestion. Hélas, les vices et les abus eurent bien souvent raison de l'un et de l'autre. Ainsi, les inconvénients d'une administration en régie étaient multiples. On notera les frais engendrés par ce modèle, l'intérêt de ses administrateurs à augmenter la dépense pour accroître leurs commissions, les pertes résultant du stockage des tissus dans les grands magasins, les retards dans la livraison des étoffes aux divers corps et les plaintes que ces derniers formulaient pour la mauvaise qualité des fournitures pour lesquelles ils n'avaient, le plus souvent, pas été consultés.

Les inconvénients liés au système de gestion par les corps étaient tout aussi nombreux. Cela obligeait les corps à détourner de leur service un officier de ses fonctions pour qu'il se consacrât à ce type d'opération pour laquelle il n'avait aucune notion. De passer des marchés qui ne soient pas au mieux des intérêts du corps, d'augmenter le prix des marchandises résultant de la concurrence que se livraient les régiments entre eux, de rendre difficiles les approvisionnements de fournitures lorsque ces dernières n'avaient pas été programmées longtemps à l'avance, de décourager les fabricants en ne leur donnant pas l'assurance d'écouler leurs stocks. Cette expérience centenaire n'ayant permis l'émergence d'un système fiable et avantageux, ce fut au tour du Premier Empire à s'emparer du problème et de trouver les solutions les plus adaptées pour vêtir les officiers et soldats des différents corps de cette époque d'uniformes d'une grande flamboyance.

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